Xavier, CTO d’une entreprise qui écrit du code qu’elle n’a pas le temps de vérifier, fait le point avec Victor, son CEO.

— Et ta dernière recrue ? Je pensais qu’elle était parmi les meilleures dans sa spécialité.
— C’est le cas. Elle nous a déjà permis d’éviter le pire. Mais ça ne résoudra pas notre problème.
— On m’a dit qu’elle manquait de tact. Je te passe les termes exacts…
— Elle annonce des mauvaises nouvelles à des développeurs qui ne sont pas prêts à les entendre. C’est logique.
— Ok, moi je veux bien, mais…
— Ecoute, si la contrainte c’est que tu n’entende plus un DEV taper sur la QA à la bière du vendredi soir tu peux dire adieu à nos objectifs.
— Qu’est-ce que tu veux, il faut les ménager. Sans leur travail on n’aurait pas cette nouvelle version.
— Il ne s’agit pas de les blâmer, ni de les ménager. Tu te rends compte qu’on en est à se demander comment réussir à sortir notre prochaine version sans froisser personne ?
— Oui mais tu ne peux pas compter sur l’engagement des équipes tout en te montrant parfaitement indifférent à ce qu’ils vivent.
— Observe notre processus. Lui est parfaitement indifférent aux réactions des uns et des autres. Et tu sais ce qu’il dit ?
— Non, mais vas-y je t’écoute…
— Regarde le tableau de bord : sur l’activité totale déclarée ces 10 derniers mois, on a 52% de correction et 17% de refacto. Voilà ce qu’il dit, le processus.
— Oui, alors les problèmes de qualité, c’est ta partie, je te signale.
— Je continue : pendant ce temps, les chiffres de Virginie et son équipe PO sur le backlog : 45 stories en cours.
— Pour ça elle a le sens de ce que “sprint” veux dire !
— Tu parles. Les développeurs sont contents de juste pouvoir livrer leur stories en recette. Advienne que pourra. Demain il fera jour. Ils veulent des bons chiffres.
— …
— On s’est planté, Victor. On a tout mis sur la productivité. Et on a failli livrer une version qui nous aurait sorti définitivement du marché. Exit. Alors qu’on se croyait prêt.
— On va trouver une solution, arrête de t’énerver.
— On va changer le modèle, surtout.
— Oui alors moi les modèles…
— Il faut changer les rôles. Les prérogatives. Les priorités. La moitié de l’activité de DEV consiste à corriger des défauts. Tu les questionnes sur un défaut : c’est toujours la faute à pas de chance. Le manque de temps. La pression. La complexité accidentelle dans le code.
— Mais de quoi tu me parles ?
— Je te parle d’une équipe qui doit changer sa façon de coder.
— Je croyais que ce qu’il nous fallait c’était plus de testeurs ?
— Moi aussi ! Parce que je ne lisais plus le tableau de bord.
— Bon c’est pas le tout : qu’est-ce qu’on fait ? C’est quoi ton plan ?
— Il n’est pas encore complètement sec. Mais j’ai besoin de temps.
— Combien de temps ?
— Donne moi 30%
— 30% de quoi ?
— De budget en plus. Ou bien on peut aussi reporter la v2 à Mars.
— Euh… Non ! Tu n’es pas sérieux ?
— On en reparle demain, faut que je file.

regulateur-11

Publié sur Linked In le 04/11/2024