— Bon Victor, tu sais pourquoi on doit se parler aujourd’hui ?
— Si je ne me trompe pas, c’est à cause de la discussion de l’autre jour, après la démo… 🧱
— Discussion ? Ce n’est pas des discussions que vous avez toi et Jérémie, ce sont des batailles ! — Je reconnais que c’est allé trop loin.
— Avoir un avis tranché sur la qualité de ce qu’on fait, c’est bien, mais à un moment il faut faire la part des choses.
— C’est juste qu’on a une démo qui plante, et qu’on ne fait rien pour changer ça.
— Jérémie est à son poste depuis 3 ans. Il en sait bien plus que toi sur le produit. Si tu penses pouvoir apporter des améliorations, ce serait une erreur de ne pas t’en faire un allié.
— OK.
— En toute franchise : est-ce que tu considères toujours avoir fait le bon choix en nous rejoignant ?
— Franchement, ici c’est très différent de l’entreprise où j’ai fait mon stage. Je ne m’y attendais pas.
— À quel point différent ? Ton stage portait sur le même type de produit, la même technologie.
— Jérémie réagit toujours comme s’il considérait qu’il a avec lui une équipe de bras cassés.
— Je ne peux pas te laisser dire ça. C’est mal le connaître.
— Il est le garant de la qualité du projet.
— Bien sûr. Ça te choque ?
— Non. Mais est-ce que ça veut dire que s’il n’est pas là, il n’y a pas de qualité ?
— C’est plus compliqué que ça.
— Dans mon équipe précédente, le garant de la qualité ce n’était pas une personne.
— Ah non ? C’était quoi ?
— Le standard.
— Les standards, c’est une chose…
— Non, pas les standards, le standard. C’est à dire : la meilleure pratique de l’équipe à l’instant t pour une activité donnée.
— Oui, bien sûr. Et ce n’est pas ce que vous mettez en place, toi, Jérémie et toute l’équipe ?
— Bah non.
— Et qu’est-ce qui te fait dire que non ?
— Est-ce que tu dirais que tu as un standard si on ne parle jamais du standard ?
— Qu’est-ce que tu veux dire ?
— Pas de debrief, pas de relecture, pas de revue. Ça prend trop de temps, paraît-il.
— Si ça doit partir en bataille de rue à chaque fois, je te confirme qu’on a zéro minute à consacrer à ça.
— C’est parce qu’on ne sait pas les faire.
— Peut-être.
— Pour s’améliorer, il faudrait commencer. Mais non. On avance dans le noir. Un coup ça marche, un coup on tombe sur un truc. On n’apprend pas.
— Tu exagères. On apprend ici, plus qu’ailleurs, c’est certain.
— Comment le savoir ? Il n’y a pas de standard. C’est comme si on produisait les pièces et qu’ensuite on cassait le moule.
— Qu’est-ce que tu proposes ?
— Je propose qu’on décrive le standard.
— Et comment tu proposes de faire cela : décrire le standard ?
— Simple : en relisant du code ensemble.
— Mais quel code ? Tout le code ? Où est-ce qu’on trouve le temps ?
— Pas tout le code d’un coup, évidemment.
— Par où commencer ?
— Par le code qui plante. Ce serait un bon début.

publié sur Linked In le 23/05/2023