Fatalités ?
plateaux #3
[cohesion, plateaux, state-of-the-art]
Merci Cédric Crevier pour ta contribution à cette conversation ! Le paradoxe d’un projet correctement cadré qui perd de sa cohérence en cours de réalisation peut en effet s’expliquer facilement si l’on prend ton hypothèse (fréquemment observée) des incitations perverses (c’est à dire au fond des politiques détournées de leur but) :
👉 prendre des décisions hâtives ou irresponsables dont on fera porter la responsabilité aux prestataires
🪣 créer de la dette technique que l’on n’aura jamais à “nettoyer”
🐔 ne jamais être le premier partenaire à annoncer un retard (a.k.a “Chicken Planning”)
🧳 quitter ses responsabilités pour un salaire moins ingrat…
Si ces comportements se vérifiaient toujours (je ne le crois pas), cela signifierait que tout projet de développement perd nécessairement de sa cohérence au fur et à mesure de sa réalisation, pour des raisons extrinsèques au projet lui-même : à savoir qu’une entreprise ne constitue pas un environnement suffisamment stable et intègre pour mener des développements complexes.
🏢🧩🤔
Cela signifierait également que la perspective de réussir un projet (en termes de retombées sonnantes et trébuchantes, mais aussi en termes d’image, ou de fierté personnelle et interpersonnelle) n’est jamais suffisante pour contrer les incitations perverses. Nous retrouvons à nouveau le problème du prisonnier. Les règles apparentes ainsi que la connaissance du projet (établie lors du cadrage) suggèrent de ne jamais jouer “collectif”, ou du moins pas jusqu’au bout : au fur et à mesure que le projet se réalise, qu’il gagne en complexité, donc en difficulté, les différents acteurs cèdent à l’incitation, et se “désistent” du collectif.
Pour répondre à ce problème il faudrait alors expérimenter des contre-mesures qui rendent ces incitations caduques :
✋ décourager le blâme (et la tolérance au blâme) en pratiquant une communication congruente à tous les niveaux du projet sinon de l’entreprise
📝 faire de l’état de l’art du projet une responsabilité partagée et créer les rituels permettant de l’expliciter, et donc de maintenir sa cohérence
🍐 éliminer le chicken planning en dotant l’ensemble des partenaires d’un buffer collectif partagé, permettant d’encaisser les aléas au lieu de se couvrir en mentant par omission
🏷 établir une grille de salaires attractive et cohérente avec le marché
Tout un programme ! C’est très ambitieux, mais au moins nous savons ce que nous pourrions essayer s’il était avéré que tout projet subit nécessairement la loi des incitations perverses.
Or je crois que ce phénomène n’est pas une fatalité.
Pour ce qui concerne l’acteur Technique, je sais d’expérience que dans ce domaine que chacun·e vient au travail avec le désir d’apprendre, de partager du sens, et de réussir des projets. Ce n’est certes pas suffisant, mais c’est un bon début !